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Emma Moulin-Desvergnes / poèmes


Ci-dessous, trois poèmes inédits d'Emma Moulin-Desvergnes, dont le recueil Cercles a paru en décembre 2019 (avec une postface de Frédéric Moulin).





Animal machine


La robe de la Fille chaise chute au bas des escaliers. La crinoline se tresse de cordes nerfs clef de sol. Entre la sculpture-machine et la doll de démonstration, des espaces tapissés de polaroïds.

JE

est une surface plane hérissée de clous de vision (regard+image)

Ubique JE est formes pures cauchemar minéral micros télévisions.

Fibres d’images parlantes sous la voix. Un alliage aléatoire plus qu’un vouloir.

DIRE. Avec cet esprit acuponcteur.



 

Rituel de transsubstantiation


Elle file la toile de l’image araignée. Sa mère la regarde, image fanée dans un cadre, comme on épie, pas comme on couve. Quand la pelote est faite, l’image s’évanouit. La fille reste avec sa pelote. Derrière la mère s’ouvre une double porte derrière laquelle se déploie une fête avec de jeunes gens. Leurs sourires s’arrêtent comme des photographies. Elle y entre, sœur de deuil dans la chambre noire. Pieds devant sous le voile. Elle se mêle aux autres comme les autres. Des visages, surgit une sorte de lumière qui a la lueur jaunie du ricanement hors champ. Les images des mondains tournent en boucle. Toujours les mêmes gestes et puis les mêmes mots. Son voile se déchire sous les tiraillements. Tous vont par deux sauf elle.

Puis il vient C’est une statue aux pieds de laquelle elle danse. Un bloc de pierre à l’effigie de son mortel souverain. Encadré par deux portiques dieux du stade mimographie tragédie grecque. Colonnes, muscles saillants, corps arrêtés.

Contempler son corps obéissant dans l’œil convexe. Eau froide vif-argent du monde flottant. Mais l’ami de midi est une statue qui l’attaque et la poursuit. Quand elle part, il fait tourner d’autres photographies dans la chambre noire. Elle s’enfonce dans l’eau sous la jetée pour lui échapper.

Médusée, elle coule en robe blanche. Négatif chambre noire. Solarisation artifice.

White Dress White Dress White Dress



 

Les visages


Pas tout à fait elle l’autre dans le miroir ni l’œil qui la regarde. Je suis Out there L’inside est une place vide sinon l’œil qui de temps à autre la fait exister l’image qui me détruit. Araignée autophage. Je suis Personne. Je suis une fiction

Déjà réduite à l’état de ruines Désertée de sa place entre des mains élues elle déploie son implacable mécanique. Un robot de jouissance.

C’est alors qu’entre le poète Dylan Thomas, ivre comme il se doit, effarant alentours avec son effarante bedaine et sa voix qui tonitrue, son œil qui invective. Et pourquoi pas ROUGE bordel ! Je voulais que ça laboure et que ça trépane, que ça pilonne et que ça broie, je voulais hérisser toute la page de virilité guerrière. J’ai lu ce mot quelque part dans un dictionnaire et je n’ai jamais pu remettre la main dessus ! L’empoigner. Et pourquoi pas ROUGE bordel ! C’est une putain de dictature !

Elle est en désordre. Bouteille renversée sur l’ordinateur. Dictionnaires poignardés. Cheveux hirsutes et de sorcière.



© Emma Moulin-Desvergnes



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