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MA PATRIE A4
Patria mea A4

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ANA BLANDIANA

 

recueil bilingue
Traduit du roumain par Muriel Jollis-Dimitriu
Introduction de Jean-Pierre Longre

isbn 978-2-919582-20-4 – avril 2018 – 126 pages – 15 €

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Un poème que je ne dis pas, un mot que je ne trouve pas
Mettent en péril l’univers
Suspendu à mes lèvres.
Une simple césure dans le vers
Détruirait le sortilège qui dissout les lois de la haine,
Les rejetant tous, farouches et solitaires,
Dans la grotte humide des instincts.

« Biographie »

 

Née Otilia Valeria Coman en 1942 près de TimiÅŸoara, Ana Blandiana a été très tôt en butte à la censure, mais a persisté dans sa volonté d’écrire en restant dans son pays, exilée de l’intérieur. Dès le premier recueil, publié en 1964, sa poésie a connu un succès d’autant plus grand qu’elle correspondait à l’état d’esprit et à la sensibilité de lecteurs qui ne pouvaient complètement étouffer leurs interrogations existentielles sous les diktats du régime. Depuis 1990, son œuvre s’est largement étoffée, et elle est considérée comme l’un des auteurs les plus marquants de la Roumanie contemporaine. Autant dire que toute traduction publiée en France contribue à rendre justice à une œuvre qui mérite d’être reconnue internationalement. (Jean-Pierre Longre)

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Orice poem nespus, orice cuvânt negăsit
Pune în pericol universul
Suspendat de buzele mele.
O simplă cezură a versului
Ar întrerupe vraja care dizolvă legile urii,
Vărsându-i pe toÅ£i, sălbateci ÅŸi singuri,
Înapoi în umeda grotă-a instinctelor.

« Biografie »

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à propos d’Ana Blandiana

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Lauréate 2018 du Griffin Trust For Excellence In Poetry’s Lifetime Recognition Award,

site officiel : http://www.anablandiana.eu/

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poèmes en roumain :
http://www.romanianvoice.com/poezii/poeti/blandiana.php

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autre parution en français : Les Saisons, nouvelles traduites du roumain par Muriel Jollis-Dimitriu (Le Visage Vert, 2013)
https://www.dystopia.fr/a/ana-blandiana/les-saisons

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Lauréate 2018 du Griffin Trust For Excellence In Poetry’s Lifetime Recognition Award :
http://www.griffinpoetryprize.com/the-griffin-trust-for-excellence-in-poetry-announces-ana-blandiana-as-its-twelfth-lifetime-recognition-award-recipient/

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Le 14 novembre 2018, Ana Blandiana était l’invitée de l’Institut culturel roumain de Paris
https://www.eventbrite.fr/e/inscription-le-club-ana-blandiana-51543666494#

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Ana Blandiana et Muriel Jollis-Dumitriu

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Née au sein d’une famille de musiciens, Muriel Jollis-Dimitriu accomplit en parallèle des études musicales au CNSM de Paris, et littéraires (allemand et anglais) à la Sorbonne. Elle part vivre cinq ans en Roumanie, où elle participe à la vie musicale de la ville de Cluj. Revenue en France, elle se consacre à son métier de musicienne et devient alto-solo de l’Orchestre National d’Île-de-France, tout en dédiant une partie de son temps à la musique de chambre.
Depuis quelques années, elle est revenue à une activité qui la passionne depuis toujours : la traduction. Parmi ses traductions, «Ripaille au monastère», une nouvelle de Vasile Voiculescu (parue dans la revue littéraire Academia Bârladeana, 2012), Les Saisons, recueil de nouvelles d’Ana Blandiana (le Visage vert, 2013), ainsi que Projets de passé, un autre recueil de nouvelles fantastiques d’Ana Blandiana (publié en édition bilingue par la maison d’édition roumaine Junimea, 2017).

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Jean-Pierre Longre a enseigné la littérature contemporaine à l’Université Jean Moulin – Lyon 3. Auteur d’études sur divers écrivains du XXe siècle, collaborateur de plusieurs revues, il a participé à la publication des romans de Raymond Queneau dans la Bibliothèque de la Pléiade. Il s’intéresse à la comparaison des arts (littérature, musique, peinture) et effectue des recherches sur les littératures francophones (Roumanie et Belgique en particulier). Il a notamment publié Musique et littérature (éd. Bertrand-Lacoste, coll. « Parcours de lecture », 1994), La Nouvelle francophone en Belgique et en Suisse (co-direction, CEDIC, Centre Jean Prévost, Lyon, 2004), Raymond Queneau en scènes (Presses universitaires de Limoges, 2005) et Une Belle Voyageuse. Regard sur la littérature française d’origine roumaine (éditions Calliopées, 2013).

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http://jplongre.hautetfort.com/

http://livresrhoneroumanie.hautetfort.com/

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Ma patrie A4, le confessionnal poétique d’Ana Blandiana

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un article de Cristina Hermeziu (ActuaLitté, juin 2018)

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Dans la Roumanie totalitaire du régime de CeauÈ™escu, les poèmes subversifs d’Ana Blandiana circulaient en cachette sur des feuilles volantes retranscrites avec du papier charbon. À l’instar du poème Totul/Tout, inventaire sec et atroce de petits riens d’un quotidien sans rêves, complété d’ailleurs par des lecteurs anonymes, dans un geste poétique de résistance collective clandestine. 

Un recueil de poèmes pour enfants (Întâmplări de pe strada mea,/« Petits événements de ma rue », non traduit), qui racontait les tribulations d’un chat mégalomane nommé Arpagic, fut interdit par la censure en 1988. Après la chute du mur à l’Est, Ana Blandiana a fondé le mémorial des victimes du communisme et de la Résistance, dans l’ancienne prison de Sighet, au nord de la Roumanie. Cette aura éthique d’icône emblématique pour l’engagement du poète dans les affaires de la cité et auprès de la société civile, n’a jamais fait taire sa veine poétique, délicate et subtile, puissante et assumée.

Sa marque de fabrique est une vulnérabilité qui se mue en force et son lyrisme réflexif obéit à une splendide profession de foi, qu’elle formule lors d’un entretien : « La haine est peut-être le moteur de l’histoire, mais, pour la poésie, il n’y a que l’amour comme combustible. »

Lettres blanches sur couverture noire, c’est avec ce graphisme sobre et élégant que les éditions Black Herald Press publient aujourd’hui des poèmes d’Ana Blandiana, dans la traduction de Muriel Jollis-Dimitriu. Le titre du recueil — Ma patrie A4 — est en soi une confession : empreints d’un panthéisme crépusculaire, les poèmes expriment, l’un après l’autre, la douce fatigue de l’être qui négocie constamment le réenchantement du monde par la magie du verbe.

« Les fruits doux et amers/ laissent sur mes lèvres, sur mes doigts/ Leur trace d’encre./ Ont-ils tenté d’imprimer sur moi/ La fraction autrefois secrète,/ Le nombre d’or entre les extrêmes ? » (Cerisiers amers)

Les poèmes d’Ana Blandiana sont des paysages à plusieurs plans, mais rien n’est décoratif dans ces pastels inquiétants. Ana Blandiana communique et communie avec la nature pour dire à haute voix que si le monde n’est jamais innocent, l’au-delà n’est pas vide non plus. Une poésie intensément sensitive qui produit des images « violentes » pour relier l’humain et le céleste, la vie et la mort, sans aucune panique, sans ressentiment et presque sans amertume.

« Nous sommes ici/ Entre des murs d’argile,/ Avec la vache des voisins,/ Dont nous buvons le lait/ Chaque soir,/ Trait par des mains gercées et raides/ Comme du bois mort./ Nous sommes ici/ Parmi les vieux pruniers/ Qui n’ont plus la force de donner des fruits/ Et les paysannes trop vieilles pour enfanter des paysans./ Nous sommes ici/ Et nous nous sentons bien et comme chez nous/ Dans ce monde/ Qui nous apprend à mourir. » (Murs d’argile).

Ce n’est pas le pressentiment de l’au-delà, c’est précisément l’effleurement de cette frontière et le badinage avec l’autre dimension qui électrisent constamment les poèmes, comme un arc voltaïque. Jeu de miroir par lequel la poétesse ne laisse pas la lueur s’évanouir, jeu grave de séduction qui l’aide à apprivoiser la mort, la faire sienne, la reconnaître, tel un double : « Douce confusion,/ Semblable au moment où l’on part,/ Et que l’on tourne encore une fois la tête,/ Pour se voir, comme dans un miroir, /En train de naître.» (Comme dans un miroir).

Superbe déclaration d’amour ou psaume d’une sensualité trouble, le poème « Escalier » demande pardon d’avoir fait semblant de connaître l’extase, de toucher l’intouchable, de voir l’invisible. Douce folie, délicieuse profanation d’un secret de vie : toujours guetter l’intensité et ne l’atteindre qu’en tant que nostalgie de l’extase à venir.
Traduite dans 23 langues, lauréate de la Légion d’honneur en 2009, célébrée comme grande dame de lettres engagée dans un combat qui allie justice, devoir de mémoire et démocratie, Ana Blandiana mériterait plus de traductions françaises et de lecteurs francophones.

La précédente anthologie de poèmes remonte à 2005 (Autrefois les arbres avaient des yeux, éditions Librairie Bleue, traduction de Luiza Palanciuc) et son recueil de nouvelles, Les Saisons, est paru en 2013, dans la version de sa fidèle traductrice, Muriel Jollis-Dimitriu, aux éditions Le visage Vert. Il en reste plus de vingt titres — recueils de poèmes, essais et un roman polyphonique — pour explorer toutes les dimensions d’« une écriture qui résiste et qui dans ce but dit l’absolue nécessité de la poésie. »

C’est avec ces mots que Jean-Pierre Longre salue dans son introduction la publication par les éditions Black Herald Press de ce recueil bilingue, élégant et essentiel. Ma patrie A4, ce titre-confessionnal tient ses promesses : l’alchimie poétique opère et, sur des rectangles de papier, les plus profondes expériences intérieures touchent une intimité universelle.

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